Il était une fois une belle ETI, rentable et représentant bien la culture et le savoir-faire de son territoire. Cette entreprise a un actionnariat familial sur deux générations, dont une partie a des responsabilités opérationnelles dans l’exploitation, l’autre partie ne participant qu’aux choix des grandes orientations au sein du conseil d’administration.
L’évolution des conditions du marché, de la concurrence, la nécessité d’innover et le nécessaire remplacement de l’outil de production sont autant d’éléments qui ont amené le conseil à une réflexion stratégique en termes d’investissements, dont l’importance devait affecter durablement la distribution de dividendes de l’entreprise jusque-là assez stable.
Il s’ensuivi un certain nombre de désaccords entre actionnaires, multipliant les démarches contentieuses pour modérer, suspendre ou mettre à bas tel ou tel investissement jugé trop impactant au titre des dividendes prévisibles.
Cette période de fourbissement d’armes et de procédures contentieuses s’est étalée sur presque cinq années, rendant assez difficile le fonctionnement quotidien, en affectant non seulement la fluidité mais risquant la perte de rentabilité et, à terme, de parts de marché voire le décrochage concurrentiel. Sur le plan strictement familial, imaginez l’ambiance, plus aucune communication, à l’exception des courriers d’avocats…
Devant cette situation et les perspectives des différentes procédures judiciaires engagées, coûteuses, aléatoires et surtout dont la temporalité est totalement déconnectée des nécessités de fonctionnement d’une entreprise ont amené certains conseils des parties en présence à évoquer l’hypothèse d’une médiation.
Plusieurs séances plénières ont été nécessaires pour permettre la reprise d’une communication entre les parties prenantes accompagnées de leurs conseils, pour que celles-ci parviennent à lâcher les postures contentieuses voire belliqueuses que les procédures engagées les avaient conduites à adopter.
On a assisté alors à une description parfois très approfondie des préoccupations profondes de chacun et à une réelle écoute des autres, prenant enfin la mesure réelle de l’impact de telle ou telle décision et permettant une réflexion de tous sur les orientations possibles.
Peu à peu, la nécessité de la participation à une médiation de la troisième génération, des quarantenaires pour la plupart dans le même secteur d’activité, a été confirmée, tant le besoin de structuration et de pérennité des solutions identifiées était important.
Nous voilà donc plus nombreux mais surtout plus enthousiastes qu’au début de la démarche !
Peu à peu, la parole se libère, les choses sont dites, quelque fois crûment, c’est dur mais on avance et tout le monde le ressent.
Des pistes de réflexion sont identifiées, sur tous les plans, on laisse libre cours à la créativité de chacun tant sur le plan de la participation à la gouvernance de l’entreprise dont les modes de fonctionnement sont également questionnés, que sur les plans patrimoniaux, successoraux.
Les conseils sont alors particulièrement mis à contribution pour confirmer la faisabilité des hypothèses, la complexité de leur mise en œuvre, les garde-fous nécessaires à prévoir, des réunions d’étude entre conseils sur tel ou tel point sont prévues.
Un protocole d’accord est élaboré par l’ensemble des parties prenantes y compris la troisième génération, appelée un jour à reprendre les rênes de l’entreprise. Les investissements nécessaires sont décidés, leur financement est trouvé, une répartition différente des responsabilités opérationnelles se met en place, l’entreprise va bien et peut faire face à la concurrence sans crainte. Des optimisations successorales sont trouvées et la famille a retrouvé la sérénité d’antan….
Cinq ans plus tard, …tout va bien ! Cette médiation aura pris 30 heures, sur une durée de 6 mois et aura coûté moins de 50 k€ sur des enjeux de plusieurs millions d’euros pour ceux qui sont quantifiables…
Olivier CASTELLO / CSL Conseil